François Athanase Charette de La Contrie, né le 2 mai 1763 à Couffé et mort fusillé le 29 mars 1796 à Nantes, est un militaire français et un général royaliste de la guerre de Vendée.
Né dans une famille de petite noblesse bretonne, Charette commence sa carrière militaire en 1779, comme garde de la Marine à Brest. Il participe aussitôt à la guerre d'indépendance américaine, d’abord au large des côtes françaises, puis dans les Antilles. Après la paix, il prend part à quelques campagnes dans les mers du Nord, aux Antilles et en Méditerranée. Il est élevé au grade de lieutenant de vaisseau en 1787 et démissionne en 1790.
Marié la même année avec Marie-Angélique Josnet de La Doussetière, Charette hérite du château de Fonteclose, près de La Garnache, en Vendée. C'est là, en mars 1793, que des paysans insurgés contre la levée en masse viennent le chercher pour le mettre à leur tête.
Entre mars et juin, Charette s'impose difficilement comme le commandant des insurgés des régions de Machecoul et Legé. Le 30 avril, les différentes armées vendéennes s'unissent pour former l'Armée catholique et royale, mais dans les faits Charette continue d'agir de manière indépendante.
En septembre et octobre 1793, les républicains prennent l'avantage et occupent toutes les villes de la Vendée militaire. Charette passe alors à la guérilla et contrôle pendant quelques mois l'île de Noirmoutier. Le 12 décembre 1793, il est élu général de l'Armée catholique et royale du Bas-Poitou. Son commandement s'exerce alors dans le sud de la Loire-Atlantique et le nord-ouest de la Vendée.
Affaibli par plusieurs défaites successives à la fin de l'année 1793, Charette parvient à échapper aux colonnes infernales qui ravagent la Vendée dans les premiers mois de l'année 1794. Les massacres indiscriminés commis par les républicains poussent les paysans à se réfugier auprès de lui, ce qui regonfle les rangs de son armée.
En décembre 1794, Charette accepte d'entamer des pourparlers avec les représentants de la Convention thermidorienne et le 17 février 1795, il conclut la paix et reconnait la République lors des négociations de La Jaunaye. Cependant, il reprend les armes le 24 mai, après être entré en relation avec les princes en exil, les Britanniques, les émigrés et les chouans de Bretagne. En juillet, Charette est reconnu par Louis XVIII comme généralissime de l'Armée catholique et royale.
La relance des hostilités tourne cependant au désastre. Abandonné par ses hommes, Charette est capturé le 23 mars 1796 dans les bois de la Chabotterie. Condamné à mort, il est fusillé six jours plus tard à Nantes, sur la place Viarme. Sa mort marque la fin de la deuxième guerre de Vendée.
Par la pérennité de sa résistance, Charette passe dans la mémoire collective comme le général emblématique du soulèvement vendéen. Ses choix stratégiques, sa rivalité avec d'autres chefs et sa responsabilité dans des cas d'exactions lui valent cependant d'être le général vendéen le plus controversé, y compris au sein du camp royaliste.
Biographie
Famille et jeunesse
Photographie en noir et blanc du château de La Contrie.
Vue du château de La Contrie, à Couffé, au début du xxe siècle.
Le chevalier François Athanase Charette de La Contrie naît le 2 mai 1763 à Couffé, près d'Ancenis, au nord-est de Nantes1. Sa mère, Marie-Anne de La Garde de Montjeu, née en 1732, est issue d'une vieille famille du Gévaudan1. Son père Michel Louis Charette de La Contrie, né en 1719, est un militaire de carrière, capitaine au régiment de Brissac1. La famille de Charette de La Contrie trouve ses origines en Bretagne et est vraisemblablement anoblie par charges au xvie siècle2. Le parrain de François Athanase, Louis Charette de La Gascherie, est conseiller et doyen au Parlement de Bretagne3,4. Sa marraine est Mme Busson de La Marière, née Julie Raudais de La Moinerie3,4. Parmi ses oncles, Jacques-Nicolas Fleuriot de La Freulière, devient également un chef vendéen5. François Athanase a pour sœur et pour frère : Marie-Anne, née le 1er avril 1757, et Louis Marin, né 17 avril 17596. Six autres enfants meurent avant d'atteindre l'âge adulte : Marie, née en 1751 ; Françoise, née dans les années 1750 ; Louis Ambroise, né 1765 ; Pierre Louis, né en 1767 ; Louis Nicolas, né en 1768 ; et Jacques René, né en 17737.
François Athanase passe sa jeunesse au manoir de La Contrie, dans le bourg de Couffé8. Il pourrait avoir fait des études au collège des oratoriens d'Angers3. Son père meurt le 25 mai 17759, suivi par sa mère le 3 janvier 17835. En tant que cadet, François Athanase hérite des métairies de La Vendière et de La Tournière à moitié avec sa sœur Marie Anne, tandis que le reste de la fortune échoit à son frère aîné, Louis Marin9.
Carrière dans la marine royale
Guerre d'indépendance américaine
Le 20 mars 1779, François Athanase Charette de La Contrie reçoit sa lettre de nomination comme aspirant garde de la Marine10,11. La guerre d'indépendance américaine fait alors rage depuis quatre ans et la France a rejoint les hostilités contre la Grande-Bretagne depuis quelques mois10.
Le 24 mai 1780, Charette, alors âgé de 17 ans, embarque à Brest sur L'Auguste, un vaisseau de ligne chargé de protéger les côtes françaises12, mais il tombe malade à plusieurs reprises et manque des sorties12. Le 2 mars 1781, le bateau est désarmé pendant quelques jours et Charette est débarqué pour être envoyé à l'hôpital13. Remis sur pied, le 16 avril 1781, il monte à bord du Hardi, un vaisseau intégré à l'escadre de La Motte-Picquet, alors forte de six vaisseaux de ligne et deux frégates14. Le 2 mai, cette escadre rencontre un convoi anglais chargé du butin pris lors de la conquête par l'amiral Rodney de l'île néerlandaise de Saint-Eustache, le 3 février14. Les deux vaisseaux d'escorte du commodore Hotham prennent la fuite et vingt-deux navires marchands sont capturés par les Français14.
Le Hardi met ensuite les voiles le 28 juin pour se joindre à l'expédition espagnole de Luis de Córdova à Cadix, mais il doit retourner à Brest le 7 septembre, où il est désarmé14.
Article détaillé : Bataille des Saintes.
Huile sur toile représentant plusieurs navires engagés dans une bataille navale.
La bataille des Saintes, huile sur toile de Thomas Whitcombe, 1783.
Le 15 octobre, Charette change d'affectation et monte sur Le Clairvoyant, un cotre15. Le 14 février 1782, ce dernier appareille à Brest pour les Antilles avec un convoi de navires marchands et de transports de troupes15. Il atteint Fort-Royal, en Martinique, et rallie les escadres du vice-amiral de Grasse15. Le 8 avril, la flotte prend le large, mais elle est attaquée par les escadres britanniques des amiraux Rodney et Hood15. La bataille des Saintes s'engage le 9 avril et s'achève le 12 par le pire désastre de la guerre pour les forces françaises15. Le Clairvoyant parvient à s'échapper sans grand dommage vers la Guadeloupe et fait escale en différents points des Antilles15.
Le 24 juin, Charette débarque au Cap15 et passe sur le vaisseau de ligne L'Hercule, fortement éprouvé lors de la bataille des Saintes16. Le vaisseau rejoint l'escadre du marquis de Vaudreuil qui, à la fin de l'année, se dirige vers la Jamaïque où avec la flotte espagnole est prévue une action16. Mais, l'ouverture de négociations de paix entre la France et la Grande-Bretagne et la conclusion d'un accord de cessation des hostilités le 3 février rendent désormais toute action inutile16. L’Hercule et plusieurs autres navires retraversent l'Atlantique et atteignent le port de Brest le 17 juin, où ils sont accueillis par une population enthousiaste16. Charette débarque à terre onze jours plus tard16.
Campagnes en mer Baltique et aux Antilles pendant la paix
Dessin en noir et blanc d'un navire à trois mâts.
La Cléopâtre, par Robert Dodd, 1793, Royal Collection.
La paix conclue entre la France et la Grande-Bretagne, Charette reste à Brest près d'une année afin de compléter sa formation d'apprenti marin16. Il reprend la mer en mai 1784 sur une gabare, La Loire, pour une expédition avec cinq autres navires visant à ramener en France du bois de charpente depuis le golfe de Riga, dans l'Empire russe17. Il est de retour à Brest le 4 septembre17. En octobre et novembre, le navire effectue encore quelques missions de cabotage côtier à Port-Louis et Paimbœuf17.
Le 11 juin 1785, Charette monte à bord de La Cléopâtre. Cette frégate parcourt les côtes espagnoles dans un premier temps puis part pour la Martinique, qu'elle atteint le 5 décembre18. De là, Charette s'embarque sur Le Dauphin, un petit brigantin qui sert probablement de navire école pour la formation des futurs lieutenants de vaisseau18. Charette en assure le commandement du 12 décembre 1785 au 4 avril 178618. Il commande ensuite la rade de Saint-Pierre, à bord d'un ponton, chargé de surveiller les va-et-vient des navires, jusqu'au 12 octobre18. Du 8 janvier au 31 mai 1787, Charette effectue son dernier commandement aux Antilles à bord d'un petit bâtiment, Le Vigilant18. Son service terminé, il retourne à bord de La Cléopâtre qui appareille le 8 juin à Saint-Pierre18. Une avarie de gouvernail oblige à un arrêt à Glocester, dans le Rhode Island, aux États-Unis18. Le 29 octobre, le navire est de retour à Brest18.
Ayant effectué les six années nécessaires à sa montée en grade, Charette est promu lieutenant de vaisseau le 11 novembre 1787, à l'âge de 24 ans18. Le capitaine de vaisseau La Bouchetière, le commandant de La Cléopâtre, indique alors qu'il est actif, plein de zèle, et qu'il a toujours rempli ses devoirs18,19. Charette prend ensuite un congé de six mois18.
Campagne en mer du Levant contre les corsaires grecs
Le 10 mai 1788, Charette embarque sur La Belette, une corvette de 18 canons commandée par le capitaine de vaisseau Hesinisy de Moissac20. Celui-ci est assisté par le comte de Ferrières, major de vaisseau, par le chevalier Gras de Preville, lieutenant de vaisseau de première classe, ainsi que par le comte de Pierre et le chevalier de Charette, lieutenants de vaisseaux de seconde classe20. Intégrée à l'escadre d'évolution du marquis de Nieul, la flotte rallie à Gibraltar une division navale venue de Toulon, puis elle entre dans la mer Méditerranée20. Elle se porte sur Carthagène, puis sur Alger où elle arrive à temps pour secourir des navires marchands français contre un corsaire barbaresque20. La Belette quitte ensuite la flotte pour porter à Toulon « un courrier diplomatique relatif aux menaces de guerre du Bey »20. Elle rejoint ensuite le reste de l'escadre à l'île de Malte, mais celle-ci regagne la France et l'escadre est dissoute à Toulon20.
Article détaillé : Guerre russo-turque de 1787-1792.
Le 21 septembre, La Belette passe sous le commandement du comte de Ferrières et est rattachée à la division navale du comte de Thy20. Cette dernière fait alors voile vers le bassin Levantin avec pour mission de « croiser contre les pirates […] et de donner au commerce et à la navigation tous les secours et la protection qui peuvent assurer leurs opérations »20. À la suite de l'annexion du Khanat de Crimée par la tsarine Catherine II, une guerre fait rage entre l'Empire russe et l'Empire ottoman, ce qui donne un élan à une foule de petits corsaires turcs, grecs ou russes qui assaillent les navires marchands20. La France, alliée de l'Empire ottoman, tient alors à sécuriser son commerce avec la sublime Porte20. Début novembre la division de Thy arrive au large de Smyrne, où elle relève celle de Saint-Félix20. De Thy donne ensuite pour instruction à La Belette et à l'aviso L'Impatient de croiser entre Navarin, dans les îles Ioniennes, et la Crète, afin d'escorter les bâtiments français jusqu'à l'île de Sapientza20. Les Îles Ioniennes sont à cette époque le repaire de corsaires grecs et esclavons battant pavillon russe20. Les deux bâtiments français effectuent leur mission pendant les mois de novembre et décembre et se portent jusqu'aux côtes de l'Albanie, où, à au moins une occasion, les hommes de La Belette livrent un affrontement contre des pirates grecs20. En février et mars 1789, des vents violents immobilisent pendant plusieurs jours La Belette et L'Impatient dans le port de Corfou, alors territoire de la république de Venise20. Lors des fêtes du Carnaval, l'explosion accidentelle d'un magasin de poudre près du port manque de peu d'endommager gravement les deux navires français20. Par la suite, Ferrières rencontre des navires marchands à Cythère et les escorte jusqu'aux Dardanelles20. Finalement le 17 juin 1789, à son arrivée au port de Naples de Romanie, Ferrières reçoit l'ordre du comte de Thy de regagner Toulon20.
La Belette accoste à Toulon le 12 juillet 178920. Charette quitte le navire le 22 août, après avoir touché 1 347 livres et 10 sols pour sa campagne dans les mers du Levant20. Le 14 novembre, une demande de congé de huit mois lui est octroyée et Charette regagne la Bretagne20.